Analyse radiocarbone des peintures et pigments
Les peintures de nouvelle génération sont plus respectueuses de l'environnement, car elles contiennent des composants naturels.

On parlera de peintures biosourcées fabriquées à partir de composés renouvelables et d'origine végétale ou animale, contrairement aux peintures classiques qui contiennent des composants d'origine pétrochimique. L'appellation "biosourcé" signifie qui est issu de la biomasse, les produits biosourcés proviennent donc entièrement ou partiellement de la biomasse. Il est dès lors essentiel de quantifier la part de biomasse et la part de pétrosourcé ou de synthèse. L'analyse au carbone 14 ou radiocarbone permet de définir la proportion de carbone biogénique (issu de la biomasse) et de carbone fossile (pétrosourcé).
Les propriétés du carbone 14
Le carbone 14 est un isotope instable du carbone qui est présent dans l'atmosphère et par transitivité dans tous les organismes vivants assujettis à la respiration aérobie et à la photosynthèse. Le caractère instable du carbone 14 induit qu'il se transforme en azote 14 avec le temps et suivant un rythme bien défini : tous les 5730 ans, sa concentration est divisée par deux. Après 60.000 ans, on considère qu'il a totalement disparu. C'est pourquoi la biomasse actuelle (céréales, bois, algues ou déchets organiques…) a une réserve de carbone 14 pleine. On associera la notion de carbone moderne au carbone 14. À l'opposé, le pétrole ne contient plus de carbone 14, car il provient de la dégradation de matières organiques sur plusieurs milliers ou millions d'années. L'analyse du radiocarbone, dérivée de la datation carbone 14, quantifie les concentrations en carbone 12, 13 et 14 et mesure ainsi la proportion de carbone moderne, c’est-à-dire biosourcé, et de carbone ancien, c’est-à-dire fossile.
La détection du C14 dans la peinture et les pigments
Les peintures sont des matériaux "composites", car elles contiennent différents types de composés : pigment ou colorant minéral ou organique, un liant organique et des charges minérales. Ce sont les liants et les colorants organiques qui sont fabriqués à partir de molécules issues de la biomasse. C'est donc sur eux que portera l'analyse au carbone 14.
La plupart des peintures industrielles contiennent des carbonates de calcium comme charge minérale. Le carbonate de calcium d'origine géologique ne contient plus de carbone 14. Il sera donc considéré comme un composé fossile, car il est dépourvu de carbone 14. La présence de carbonate de calcium va donc diminuer "artificiellement" la part biogénique mesurée dans une peinture. À moins que les carbonates proviennent de coquilles d'œuf ou d'huître, qui sont dans ce cas composés avec du carbone moderne. Il est important de rappeler que la norme EN 16640 considère la mesure au radiocarbone par rapport au carbone total (organique et minéral), c'est à dire qu'elle n'autorise aucun prétraitement, afin d'éliminer les carbonates de calcium par exemple. C'est pourquoi, il est indispensable d'avoir une discussion préalable à l'analyse, afin de définir la stratégie analytique adéquate.
Enfin, la norme EN 16640 accepte une incertitude de ± 2 % pour les mesures au radiocarbone par AMS (accélérateur de particules couplé à un spectromètre de masse). C’est-à-dire qu'une mesure à 98% de carbone biosourcé sera équivalent à 100% de carbone biosourcé par rapport au carbone total, aux incertitudes près.
En résumé, la mesure au radiocarbone est la plus pertinente, fiable et précise pour la caractérisation des peintures et des pigments. Cette technique fonctionne pour les matrices liquides, solides et gaz, sans avoir à connaître la composition chimique. De plus, le carbone 14 peut être utilisé à chaque étape du procédé industriel : de la R&D au produit fini, en passant par le sourcing, l'optimisation des process, ou l'obtention d'un écolabel.